La gazette piétrolaise
A Petra di Verde, u nostru paese
Les “DEGORDÌ” Suite des textes d’Antoine Straboni (2)
Tempi e tempi
1 - Ùn sò più ciò c’o sò statu
E ciò c’o era ùn seraghju mai più
U veranu e l’estate é tempu passatu
I belli ghjorni ùn rivenenu più
2 - Amore caru sinceru e amatu
T’aghju appreziatu quant’o aghju pussutu
Ma si eo ritrovassi u tempu passatu
Più forte e più caru t’averìa tenutu
3 - Oghje sò ingrisgiati i mio capelli
Unn aghju più listessa memoria
I mio talenti ùn sò più quelli
E u passatu appartene à a storia
4 - Ùn sò micca solu e ne sò cunvintu
Eo vi dicu ciò c’o risentu
Quellu bellu sole oghje é guasi spintu
Ancu u miò cantu é tristu cume u pientu
5 - U Tempu passa e nisunu l’arresta
A rota chi gira attira l’annoi
L’anni passati ùn sò micca una festa
Ma ùn si po`cambià nunda, O poveri à noi
Degordì, déc. 1991
A cicala e a furmicula
Una cicala di ste sebiate
Avìa cantatu tuttu l’estate
Ma à l’auturnu venutu u freddu
Unn avìa un rascghju à mette in le spetu.
Sentendu u muscu induve a vicina
Ghjé andata e l’ha trova in la so cucina.
E l’ha dettu: “Aio, sie cheritatosa
Sò morta di fame, prestami qualcosa.
Ti renderaghju ciò che tu mi dai
E ancu di più, quessa tu a sai!”
Ma a furmiculuccia chi ghjé interessata
L’ha dettu: “Ma st’estate tu a t’hai scialata.
Quand’eo sudava à trascinà u granu
Tu chi fecìe per quellu pianu?”
“Eo cantava, fecìa a paghjella,
Aspessu a sera mi sentìa a cannella.”
“Hai cantatu à voce rivolta
E bè ballerai à quill'altra volta.
Eo per dui unn aghju abbastanza.
U cantu ralegra ma unn empie a panza.
Si tu hai u corpu à viulinu,
Vai à scassà per fatti un spuntinu.
Eo ùn ti prestu nè un pomu, nè un fasgiolu.
Si tu perdi e braghe strigni u currighjolu.”
Octobre 1944-1984
Quarante ans aujourd’hui, sublime anniversaire!
Les souffrances endurées, les horreurs de la guerre,
Le froid et le chagrin, les blessures, l’inquiétude
Avaient tout transformé; l’existence était rude.
La forêt du Géhan, le Morbieux, Cornimont
Perdu dans la tempête, hanté par le Démon:
D’un esprit pacifiste, au coeur de la bataille,
Sous le bruit du canon, la terrible mitraille,
J’étais triste, affaibli, pensant que le destin
m’avait emmené là au bout de mon chemin.
Epuisé de fatigue et privé de sommeil,
Et attendant en vain un rayon de soleil,
Ne sachant plus vraiment à quel saint me vouer,
Par Dieu et par les hommes j’étais abandonné.
Dans ce sombre tableau, tout en broyant du noir,
Je devais jusqu’au bout bien remplir mon devoir.
J’ai tout fait de mon mieux au bord du précipice,
Au prix de gros efforts, d’inhumains sacrifices,
Lorsque je fus contraint de freiner mon allure,
Je vis couler du sang de l’horrible blessure.
Endurant les douleurs et livré à moi-même,
J’ai songé un instant au jugement suprême,
Ne sachant si c’était la déveine ou la chance
Qui allait mettre fin à toute ma souffrance.
Après mon inconscience, quand j’ai ré-ouvert les yeux,
J’ai vu quelques étoiles scintiller dans les cieux.
Pendant un seul instant ne pensant plus à rien,
J’étais encore en vie: c’est tout ça le destin.
Ce n’était pas mon heure et j’ai pu constater
Que ces éclats d’obus n’étaient pas meurtriers.
Un camion de l’armée à défaut d’ambulance
Me ramena vers Lure; de là j’ai eu la chance
D’aller vers Besançon: c’était la base arrière.
Sans être au Paradis, j’avais quitté l’Enfer.
Puis, quelques jours plus tard; tout alla pour le mieux;
Je fus, à Bourg-en-Bresse, soigné à l’Hôtel Dieu.
L’accueil chaleureux des amis au grand coeur
N’ayant qu’un seul but soulager ma douleur,
Je fus impressionné par tant de gentillesse,
Oubliant les malheurs et toute ma détresse.
Prenant goût à la vie, oubliant tout le mal,
Appréciant beaucoup le réconfort moral.
Sans nouvelles, éloignés des êtres les plus chers,
J’ai rencontré ces amis qui m’aimaient comme un frère.
Je n’oublierai jamais ce dévouement sublime.
Ceux qui l’ont pratiqué ont droit à mon estime.
Ce poème inspiré par ma reconnaissance
A ceux qui spontanément soulagèrent ma souffrance.
N’étant pas Lamartine, Hugo ou Beaudelaire,
Ce que j’ai composé est exact et sincère,
Peu importe pour moi la valeur de la rime,
C’est tout ce que je sens qu’il fallait que j’exprime.
Aujourd’hui je l’ai fait; un peu tard je l’avoue.
Le temps n’efface rien, amis je pense à vous.