La gazette piétrolaise

A Petra di Verde, u nostru paese

L’église Saint Èlie

“L’église Saint Èlie, commencée en 1710, fut ouverte au culte en 1828.  En style baroque, trois nefs, quatre chapelles latérales.  Un clocher de cinq étages.  À côté de l’église, la chapelle Sainte Croix, dédiée à Saint Michel, bénite en 1735.”

Ce sont là les rares indications que l’on trouve dans le livre du chanoine Casanova, l’histoire des églises de Corse (tome 3, p. 242), livre de référence en la matière.  Pour succinctes qu’elles soient ces indications offrent la possibilité de “re-situer” ce bel ensemble architectural dans la période qui va des dernières années du 17è siècle à la fin du 18è, au cours de laquelle ont été construites, en Corse, tant de belles églises baroques.

À ce propos, Nicolas Mattei, dans son livre les églises baroques de Corse, donne les précisions suivantes:

“L’éclosion de l’art baroque en Corse commence dans les présides.  Cela n’est pas étonnant dans la mesure où c’est là que la Sérénissime République (Gènes) est la plus présente et que les moyens matériels peuvent être mis en œuvre avec le plus de rapidité.

Un décalage d’au moins un demi-siècle apparaît avec l’intérieur des terres.  Quand les communautés rurales entameront leurs campagnes de renouveau baroque, Bastia sera passée à la phase décorative.  La ville a-t-elle servi d’exemple?  Cela est indubitable à cause de son prestige.  Cependant le baroque corse est italien…  Bastia sert de courroie de transmission.”

Ce qui caractérise l’église Saint Èlie, c’est d’abord la date de sa construction:  au tout début du 18è siècle, elle est une des premières érigées selon le style baroque dans l’intérieur des terres.

Ce sont ensuite ses dimensions.  Pour avoir été une des premières construites, les dimensions de l’église Saint Èlie supportent la comparaison avec la plupart des autres, si l’on excepte les grandes collégiales de Calenzana, Corbara, Speloncato et Luri et d’autres églises plus récentes.  D’après Nicolas Mattei:  “La moyenne des églises baroques tourne autour de 30 mètres par 11-12 mètres s’il n’y a pas de nefs latérales mais des chapelles entre contreforts, de 30 mètres par 15-20 mètres dans le cas contraire.”  D’autres églises, plus anciennes, sont de plus petites dimensions:  L’Assomption de Santa Maria Poghju di Moriani 20 mètres par 12 mètres, la Nativité de Vallica 18,5 mètres par 9,5 mètres.  Les plus récentes sont plus grandes.  L’église Saint Elie se situe, pourrait-on dire, entre les deux (26 mètres par 14).

Ce sont enfin ses proportions.  La longueur de la nef centrale est égale à environ deux fois sa largeur.  La largeur de la nef centrale représente la moitié de la largeur totale de l’église, chapelles comprises.  Dans les églises de construction plus récente, de nouvelles techniques architecturales aidant, la nef centrale est plus large, par rapport à la largeur totale (nef+ bas côtés ou chapelle latérales).

La Contre-Réforme catholique, née du Concile de Trente (1563) a pris le contre-pied de la Réforme protestante dans tous les domaines, y compris dans l’architecture.  C’est ainsi que le baroque romain s’est développé dans toute la chrétienté.  Il s’est agit de construire des œuvres “Ad majorem Dei gloriam”, pour la plus grande gloire de Dieu, selon un style éblouissant, dynamique, qui faisait une grande place à la sensibilité et à l’exaltation.  En Corse, le changement a été d’autant plus sensible qu’il n’y a pas eu, ici, de vraie transition entre l’ancien style roman et le “moderne”, que les évêques génois ont introduit simultanément à une ferme reprise en mains du clergé.

Mais il fallait aussi les moyens matériels du renouveau.  Dans l’intérieur, il semble bien que ce soit la mise en valeur des terres, entreprise sous l’autorité de Gènes dans les années 1630-1650, particulièrement la plantation massive des châtaigniers, en Castagniccia, et des oliviers, en Balagne, qui a permis, quelques dizaines d’années plus tard, de dégager ces moyens.  Il est significatif, en effet,que les églises nouvelles aient été construites en grand nombre dans ces deux régions.

Ce sont là des conditions d’ordre général.  Il conviendrait, à partir d’elles, des poursuivre les recherches afin de tenter de reconstituer comment, localement, les choses se sont passées autour et pour la construction du remarquable ensemble architectural de la paroisse de Pietra-di-Verde, comment et par qui, en à peine un quart de siècle, tout cela a pu être décidé, élaboré, projeté, financé et construit.  J’en appelle aux piétrolais, directs ou descendants, épars en France et dans le monde, et à toutes autres bonnes volontés, qui viendront sur ce site, pour qu’ils contribuent à répondre à ces questions et à mieux faire connaître notre passé commun.

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